29.10.2011 - Le Temps

«Je ne dénigre jamais les opposants à léolien»

ARC-JURASSIEN - Pour Walter Schmied, des Forces motrices bernoises, le succès de léolien se bâtira sur la concertation Le village de Bourrignon a refusé un parc sur son sol, des mouvements hostiles surgissent un peu partout. Léolien est-il mort-né sur les crêtes? Pas pour Walter Schmied, chargé de la promotion de léolien à FMB Energie
Les informations sont contradictoires. Au parc Juvent de Mont-Crosin, au-dessus de Saint-Imier, où tournent seize turbines, une étude montre que les populations vivent plutôt bien au pied des éoliennes. Par contre, là où sont envisagés dautres parcs, au Noirmont, à Tramelan ou à Lajoux par exemple, de forts mouvements dopposition se font entendre. Le 3 octobre, la commune de Bourrignon a refusé le programme dune quinzaine déoliennes de Pierre Kohler et des Services industriels genevois (SIG).
Malgré la décision de sortir du nucléaire et les bonnes expériences de Mont-Crosin, léolien est-il mort-né dans la chaîne du Jura? Comment sy prendre pour convaincre les populations? Lavis de Walter Schmied, ancien conseiller national UDC, ancien président de Suisse-Eole, coordinateur des projets éoliens pour Sol-E Suisse, filiale de FMB Energie SA chargée de la promotion des nouvelles énergies renouvelables.
Le Temps: Au vu de la vague de contestation, les projets de parcs éoliens sont-ils voués à léchec?
Walter Schmied: Non. Dautres parcs se réaliseront. Le défi consiste à concilier les intérêts stratégiques nationaux, avec la sortie annoncée du nucléaire, les intérêts des communes, des propriétaires fonciers et des opposants. Pour y parvenir, il faut partir du principe que tous les avis sont respectables. Cest une erreur de dénigrer les opposants. Le dialogue, et la capacité dadaptation sont les clés de la réussite. Et il faut donner du temps au temps. On me demande souvent: «Comment faites-vous pour convaincre?» Je ne cherche pas à convaincre. Je dialogue, jessaie de prendre en compte les arguments de lopposant, sans idée fixe et pour autant quils ne rendent pas le projet exsangue.
Nest-ce pas une tâche impossible?
Il faut expliquer. Certains prétendent que la production éolienne est infinitésimale. Cest faux. Le parc Juvent, avec ses 16 turbines, produit deux fois ce qui sort de la plus grande installation électrique de lArc jurassien, la centrale hydraulique de la Goule. Léolien est une technologie efficace, où le rapport entre quantité dénergie produite et coûts dengagement est raisonnable. Son bilan écologique est très intéressant.
Quel rôle joue une commune?
Il est décisif. Linitiative doit partir de la commune. La société électrique joue un rôle subsidiaire. Cest une erreur que de vouloir imposer ses vues.
Que dites-vous aux villageois qui affirment que les sociétés électriques des villes viennent défigurer leur paysage pour sapproprier de lélectricité verte?
Lélectricité est consommée sur place ou presque pour des raisons physiques. Sol-E Suisse et FMB proposent aux communes qui veulent développer un parc dacquérir, en priorité, tout ou partie du courant, au prix coûtant. Et il est nécessaire douvrir la société dexploitation aux intéressés de la région. Même à égalité de droits.
Comment expliquer que des autorités communales acceptent des projets éoliens, mais que des citoyens organisent des frondes?
Il faut distinguer différentes sources dopposition. La première est légitime et permet le dialogue. Des villageois craignent dêtre mis devant le fait accompli et de se réveiller, un matin, avec une turbine devant leur fenêtre. Dautres oppositions sont plus contestables. Comme celles de la Fondation suisse du paysage, qui dit oui à léolien, à condition quaucun mât ne perce la ligne de lhorizon. Cest une incohérence absolue. Que dire des oppositions idéologiques provenant de Genève ou de Zurich, qui disent aux Jurassiens ce quils osent ou nosent pas faire. Restent les opposants qui ont le privilège davoir pu construire une résidence secondaire sur les crêtes et qui refusent le développement de zones périphériques.
Parlons dargent, des royalties versées aux propriétaires et aux communes. Nest-ce pas cela qui pourrit le débat?
Financièrement, un parc éolien doit être rentable pour linvestisseur. Ce qui nempêche pas le développeur dêtre généreux. A Tramelan par exemple, nous proposons de restituer à la collectivité une partie du chiffre daffaires du parc. Après, il faut déterminer une clé de répartition entre les propriétaires, la commune-siège, les communes voisines. Un parc doit amener une plus-value.
Les projets sont multiples, anarchiques, avec des développeurs qui font de la surenchère. Est-ce quun concept global ne serait pas mieux accepté?
Je le revendique depuis longtemps. Les cantons ne se concertent pas, ou pas assez. Il faut aussi se demander sil appartient aux planificateurs de décider ou si linitiative de communes, en partenariat avec des développeurs, ne doit pas être soutenue. La principale erreur consiste à commencer par sarranger avec des propriétaires fonciers pour ensuite faire pression sur les communes.
Est-ce quun canton peut imposer un parc éolien à une commune qui nen voudrait pas?
Cest exclu. Si le processus aboutit à un refus local, il faut renoncer. Je vais plus loin. Si un projet de parc nobtient pas 75% dacceptation locale, il ne faut pas le faire. Je prône la réalisation de projets unificateurs. Même sil faut beaucoup de temps pour y parvenir.
Face à la vague dopposition, pourquoi ne pas oublier léolien et miser sur le solaire?
Le solaire na pas la productivité de léolien. La centrale photovoltaïque de Mont-Soleil, longtemps la plus grande dEurope, qui couvre léquivalent de trois terrains de football, produit en un an un huitième de ce que fabrique une éolienne de 2 mégawatts. Linvestissement est considérablement plus élevé. Il ne faut pas opposer le photovoltaïque et léolien, mais les promouvoir les deux.
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