NEUCHATEL - Derrière la querelle entre partisans et opposants aux projets de parcs éoliens dans le canton de Neuchâtel transparaît dimportants enjeux économiques. Votation le 18 mai prochain.
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La prochaine bataille aura lieu le 18 mai prochain dans les urnes. Les électeurs neuchâtelois devront choisir entre, dun côté, une initiative qui veut que chacun des projets éoliens du canton leur soit soumis, et de lautre, un contre-projet du gouvernement cantonal. Un Conseil dEtat qui veut encourager cette production par un seul scrutin suivi des procédures classiques de mises à lenquête.
Et si le volume de production et autres arguments de consommation nétaient finalement que de larithmétique électorale ?
Les initiants les estiment largement surfaits, les partisans de lénergie éolienne considèrent quils sont même trop modestes. Confirmant le constat de Christian Weber, le conseiller dEtat neuchâtelois Yvan Perrin reconnaît, lui-même, quinvestir dans léolien nest pas «rentable».
Il le sait dautant plus que deux membres de sa famille sont des agriculteurs directement concernés par lun des parcs en projet. Il sagit dinjecter de largent dans une énergie encore chère, sans réel espoir de retombées financières rapides. Et la compensation prévue par la Rétribution fédérale au prix coûtant (RPC) ne change rien à laffaire. Cette dernière ne concerne actuellement que la moitié des éoliennes de Suisse. Ce sont les partisans de ces dernières qui le constatent! De plus, les projets éoliens en Allemagne notamment, commencent à accuser une grande fragilité économique, due à un système de subventions paralysant.
A priori peu rentable, les 59 futures éoliennes neuchâteloises aiguisent pourtant lappétit des investisseurs. «Il est réjouissant de voir les fournisseurs délectricité comme Viteos (les services industriels des trois villes du canton), le groupe E et sa filiale Greenwatt, sengager en faveur de léolien», indique encore le député Vert au Grand Conseil neuchâtelois Laurent Debrot. Toutefois, la présence à Neuchâtel des Services industriels de la Ville de Genève (SIG) laisse penser que le courant éolien produit sur les sites retenus ne profitera pas entièrement à la population locale. «Je ne prétends pas que Neuchâtel nourrira toute la Suisse romande avec son éolien», ajoute cependant Yvan Perrin. Pour le conseiller dEtat, il sagit de faire un choix de société. «Jestime que la Confédération a décidé un peu trop hâtivement de renoncer au nucléaire», glisse-t-il encore.
Investisseurs locaux ou extérieurs?
Les premiers sont préférés bien évidemment, et les seconds provoquent le scepticisme de plusieurs pro-éoliens. Le canton sest ainsi «débarrassé» dixit le député Vert des promoteurs irlandais dAlpine Wind, venus prospecter la région pour installer leurs propres mâts. Ils avaient dailleurs démarché lagriculteur Christian Weber qui a préféré conclure un partenariat avec Greenwatt. Pour lui, Alpine Wind a fini par réaliser quelle navait aucun intérêt économique à poursuivre son démarchage.
Mais il y a du rififi aussi chez les acteurs locaux.
Les SIG et la société Ennova, quils avaient lancée et dans laquelle ils étaient actionnaires minoritaires (à raison de 20%), viennent de mettre un terme à leur bisbille démarrée en automne 2013. Les SIG vont reprendre la totalité de lactionnariat dEnnova, et vont ainsi développer la Montagne de Buttes et le Mont-de-Boveresse, deux des cinq parcs éoliens projetés à Neuchâtel.
Pour compléter le tableau, Ennova et les SIG sont la cible dune dénonciation pénale à Genève, de la part dune association neuchâteloise opposée à léolien. Celle-ci fustige ce quelle appelle un manque de sérieux de linvestisseur. Ennova affirme en revanche que la conduite de son projet na pas été affectée par ses propres déboires économiques. «Notre projet du Mont-de-Boveresse reste viable, même avec dautres investisseurs que nous», assure son responsable technique Jean-Luc Juvet. A noter encore quun groupe dinvestisseurs turcs sétait un moment intéressé à reprendre environ 29% des parts dEnnova.
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Par Philippe Chopard