GENEVE - SIG - Lex-cadre des Services industriels de Genève (SIG) a été reconnu coupable de corruption et condamné, hier, à 360 jours-amende (à 80 francs le jour) avec sursis par le Tribunal de police. Il devra en outre verser 98 000 francs aux SIG. Le deuxième prévenu, un Tessinois actif dans les éoliennes, a été en revanche acquitté au bénéfice du doute.
Dans sa motivation orale, la juge Isabelle Cuendet a repris des éléments apparus dans le rapport de la Cour des comptes. Elle a relevé des lacunes des SIG au niveau des prises de décision de la direction et au niveau des connaissances de cette même direction en matière déolien. Du coup, comme il était le meilleur connaisseur de ce domaine dans la régie publique, P. lex-cadre avait une grande influence sur les décisions. La direction, elle, ne recevait les dossiers concernant léolien quà la dernière minute. Dans tous les cas, «les délais étaient trop courts» pour quelle puisse les examiner sérieusement. Les analyses qui en étaient faites étaient par conséquent «inexistantes ou erronées». Il ny avait aucun «regard critique» sur ces projets, ni les compétences afin de pouvoir exercer ce regard critique. Faire capoter un accord
Dans ces circonstances, lex-cadre P. avait une grande marge de manuvre, «une position lui permettant dinfluencer concrètement les décisions». Des connaissances techniques et un carnet dadresses. Il fonctionnait comme «un rouage important». Et était tout à fait en mesure de faire capoter un accord qui lui déplaisait.
Tout ceci rend crédible les propos accusatoires dun témoin, actif dans le domaine des éoliennes en Valais. Il avait dénoncé une tentative de corruption de la part du prévenu. Lors dune rencontre en 2010 dans un restaurant de laéroport de la Blécherette (VD), P. lui aurait demandé 100 000 francs afin quil ne nuise pas à son futur partenariat avec les SIG. Cet homme choqué avait refusé. Le tribunal le croit, dautant plus quil a longtemps hésité avant de dénoncer lex-cadre. Il a fallu que des tiers le poussent à le faire. Et ces tiers (dont une personne qui était présente à la Blécherette) sont crédibles.
Le deuxième volet de laffaire se solde par un acquittement. Z., un entrepreneur tessinois actif dans les éoliennes, était accusé davoir versé 180 000 francs à la femme de lex-cadre des SIG qui travaillait pour lui. Cette somme, disait-il, était destinée à payer un ouvrage quelle avait écrit: «Ces pionniers suisses de léolien». Un livre qui, selon une expertise requise par le premier procureur Stéphane Grodecki, ne valait pas tripette. Aux yeux du Ministère public, le paiement de cet ouvrage-bidon en grande partie plagié masquait un acte de corruption. Z. offrait ainsi un joli cadeau à lex-cadre qui avait toujours favorisé son entreprise (notamment pour laccord JUEL III signé en 2011) auprès des SIG.
La disgrâce du cadre
Pourtant le tribunal a éprouvé «un doute insurmontable» dans ce cas. Il note que les propos de Z. pour expliquer ce montant faramineux nont jamais varié. Il voulait le livre bien sûr, mais également dédommager lépouse de lex-cadre que les SIG lui demandaient de licencier. Il désirait de plus éviter une procédure pour licenciement abusif et un scandale médiatique. Enfin «le lien damitié» qui le liait à cette femme, «explique quil a pu faire preuve à son égard dune certaine largesse». Les explications de Z. ont convaincu le tribunal qui note en outre que dès la fin 2010, lex-cadre nétait plus en odeur de sainteté aux SIG lesquels avaient commencé à se méfier. Son pouvoir et son influence étaient à cette époque amoindris. Un élément de plus en faveur de lacquittement de Z. Le procureur et les SIG ne savent pas sils feront appel.